MarzahnBlog

MARZAHN - JOURNAL DE TRAVAIL

Texte  Cosima Weiter

Photographie Alexandre Simon

 


29 janvier 2012

 

 

 

 

 

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28 janvier 2012

 

 

 

 

 

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20 décembre 2011


Rencontre avec Tom Bresemann
 
Tom est poète. Avec son comparse Moritz Malsch il anime Lettrétage, un lieu magnifique, dans lequel se tiennent chaque semaine et parfois même plusieurs fois par semaine des lectures de poésie. C’est au cours d’une de ces soirées que j’ai fait la connaissance de Tom et appris qu’il venait de Hohenschönhausen, c’est-à-dire tout à côté de Marzahn, à l’ouest de la voie de S-Bahn. Des immeubles semblables à ceux de Marzahn, construits à la même époque…
 
Le quartier de Hohenschönhausen est connu car c’est là que se tenaient les geôles de la Stasi. Lorsque je parle à Tom de notre projet de spectacle sur Marzahn, il répond « Marzahn, ça alors, c’est intéressant ! » et m'offre Storchennest (Nid de cigognes) un poème qu’il a écrit sur son enfance dans un Plattenbau. Tom accepte d’emblée l’idée d’une rencontre, il se prête volontiers à mes questions parfois naïves, maladroites ou brutales. Ainsi j’apprends qu’il a emménagé à Hohenschönhausen lorsqu’il avait un an. La plupart des membres de sa familles, ses oncles et tantes, ses grands-parents, ses amis… vivaient dans des immeubles semblables et il s’agissait là de la seule manière d’habiter qu’il connaissait. Il ne trouvait ça ni laid ni beau, la question ne se posait pas. Et puis les enfants détournent l’architecture dans laquelle il vivent pour un faire un vaste terrain de jeux. Il en a bien profité avec les autre gamins du quartier. Il évoque le « téléphone » que constituait le tuyau de chauffage à travers lequel il s’entretenait avec son voisin et ami qui habitait à l’étage au-dessus en collant alternativement la bouche et l’oreille contre le tuyau. Les courses poursuites dans les vastes couloirs des caves. Et enfin cette particularité qui faisait que le neuvième étage des immeubles mitoyens communiquaient, si bien que les enfants pouvaient circuler d’un bâtiment à l’autre sans passer par l’extérieur. Ils découvraient là un univers semblable au leur, presque semblable et pourtant étranger.  
 
Il avait une dizaine d’années lorsque le mur est tombé, au bon moment pour lui nous dit-il. Car la vie dans le nid de cigognes, sécurisante pour l’enfant qu’il était, serait devenue étouffante par la suite. La vie culturelle du centre de Berlin l’attirait irrésistiblement. A 10 ans, il a néanmoins attendu plusieurs mois avant d’aller « de l’autre côté ». C’est que ses parents étaient des communistes convaincus. C’était d’ailleurs le cas de la plupart des habitants, En effet, accéder à un logement neuf dans ces nouveaux quartiers si ce n’était pas un privilège, était tout de même une chance à laquelle tout un chacun ne pouvait accéder. En outre, le père de Tom travaillait pour la Stasi et à ce titre, il n’avait pas le droit de passer la frontière, même après son ouverture. Tom a donc dû patienter pour aller voir l’ouest, jusqu’à ce que des amis l’emmènent avec eux…  Il habite aujourd’hui dans un vieil immeuble mal isolé de Neukölln. Pour rien au monde il ne retournerait dans un Plattenbau. Il n’en supporterait plus l’atmosphère. Le fait que chacun sache tout de tout le monde. Et surtout nous dit-il, là-bas, le moindre de tes actes acquiert une valeur particulière, un sens qui le dépasse. Ici, à Kreuzberg, il écrit parce que ça lui plaît, et cela lui suffit.




 

 

 

 

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9 décembre 2011

 

 

 

 

 

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4 octobre 2011

 

 

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Je suis retournée à Eastend. Seule. J’ai passé l’après-midi à une table, et j’ai d’abord invité Paul à venir me parler de son rapport à ce quartier. De son histoire, de la manière dont il voit son avenir. Paul a une vingtaine d’annés, il est stagiaire à Eastend, qu’il a auparavant assidûment fréquenté en tant que musicien. Il y a répété avec son groupe, enregistré ses morceaux… Il respire la joie de vivre et se prête volontiers au jeu. Il m’explique qu’il n’habite pas dans un Plattenbau, mais dans une maison au bord de la Spree. Il n’a pas le projet d’en partir, et pour cause : ses parents vont déménager d’ici peu et lui laissent la maison. Il a déjà commencé d’y aménager son studio et se réjouit d’y répéter bientôt. Son avenir ? Il veut devenir éducateur. Faire de la musique avec des jeunes. Partager sa passion avec eux… Paul, est un plein d’enthousiasme. C’est un plaisir de parler avec lui.

 

Ensuite, mes discussions avec les jeunes me laissent perplexe, vaguement inquiète tant j’ai le sentiment que certains sont dénués de tout espoir. Une jeune fille surtout. A qui je demande ce qu’elle vient faire à Eastend, quelle activité elle pratique. Rien répond-elle, je suis là, c’est tout. Et qu’est-ce que tu aimes faire dans la vie ? Silence. Tu as des projets pour plus tard ? Silence. Il y a dans le quartier un endroit que tu aimes particulièrement ? Non. Il t’arrive d’aller au centre de Berlin ? Des fois je vais à Eastgate. J’achète des vêtements. L’entretien tourne vite court. J’ai l’impression que toutes les questions que je pourrais lui poser sont piégées. Je la remercie et propose à une autre jeune fille de venir s’asseoir à la table. La petite Caroline est plus ouverte, elle surmonte sa timidité pour répondre à mes questions. Plus  tard, elle souhaite vivre à la campagne, avec des animaux. Elle veut travailler avec des chevaux, les soigner les nourrir… Si elle est heureuse à Marzahn ? Non, ses parents ne gagnent pas assez d’argent. Alors ils se disputent Il aurait fallu acheter ceci plutôt que cela et comment faire maintenant pour payer le loyer, l’électricité… Sa mère est vendeuse, un minijob (quelques heures de travail par semaine, qui ne rapportent pas plus de 400 euro par mois, ce qui évite à l’employeur de payer des charges sociales, car il ne peut être considéré comme un employeur principal). C’est pas assez payé. Et son beau-père  est au chômage. Elle réfléchit un moment, et elle me dit, tu sais moi aussi je serai vendeuse. J’espère juste que ce sera à l’animalerie. A l’animalerie ce serait déjà bien. Vient ensuite un garçon très sérieux. Il vient ici pour rencontrer ses amis et jouer au babyfoot. Il ne sort jamais du quartier. Pour quoi faire il y a ce qu’il faut ici. Plus tard il travaillera à la deutsche Bahn. Conducteur de train. Il a déjà des contacts. Son oncle travaille à la Deutsche Bahn il fera comme lui… Son avenir est tracé et rien ne le fera dévier de son ambition. Tant de certitude me met mal à l’aise, à peu près autant que le néant entraperçu tout à l’heure.

 


 

 

 

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Heureusement je retrouve une saine détermination et une belle énergie chez Simone, qui a fondé Eastend avec quelques autres éducateurs. Elle me raconte comment ils ont trouvé les fonds nécessaires, rénové les le bâtiments… Les instances auxquelles ils ont demandé de l’argent ont vite compris qu’il était mieux et finalement moins coûteux pour la communauté que les jeunes jouent au babyfoot ou fassent de la musique sous l’œil bienveillant d’éducateurs surmotivés plutôt qu’ils traînent dans les rues à longueur de journée.

Simone vit dans un Plattenbau depuis son enfance. La vue dégagée, l’espace, le côté fonctionnel de son appartement représentent pour elle un confort incomparable. Et la campagne n’est pas loin. Pour rien au monde elle ne quitterait son quartier et le mode de vie qui va avec pour un autre.

 

Je comprends progressivement qu’elle est blessée par l’image de Marzahn qui est devenue très négative depuis la chute du mur. Comment un quartier que l’on considérait avec tant de fierté comme comme l’expression même de la modernité a-t-il pu il devenir en si peu d’années le lieu sinistre et mal famé que l’on décrit dans les journaux ? Oh elle a bien vu déménager les plus aisés pour d’autres quartiers plus cossus, ceux qui enfin pouvaient réaliser leur rêve d’une maison individuelle. Elle a vu ses voisins perdre leur emploi. En trouver un autre, ou pas. Elle a vu le « lien social » se détériorer, comme on dit. Simone n’est pas naïve. Elle comprend. Mais à Eastend, elle travaille chaque jour à ce que le monde ressemble un peu à l’idée qu’elle s’en fait. Et l’ouvrage ne manque pas.

 

 

 

 


 

29 juillet 2011

 

Sur le toit

 

Nous avons rendez-vous avec M. Enzelberg à 15h00 au pied du Weigelplatz 18. Nous arrivons en avance, marchons sans répit autour de la place aux contours et à la numérotation indéchiffrables pour trouver la bonne entrée. Nous demandons notre chemin. Réponse : Ce n’est pas par là… essayez par ici. Le stress monte, car nous savons l’un et l’autre à quel point nos hôtes sont ponctuels, et qu’ils manquent parfois de compréhension face à notre difficulté à nous répérer ici. Après une bonne suée, nous nous retrouvons à l’heure juste au bon endroit. Comme prévu, Monsieur Enzelberger ne se fait pas attendre. Nous nous attendions à voir arriver un genre de concierge en jean et tee-shirt. C’est un monsieur cravaté qui sort d’une auto haute sur roues, adaptée pour la traversée du désert de Gobi, mais légèrement surdimensionnée pour les déplacements en Brandebourg… Lunettes de soleil à l’avenant. A sa suite, nous saluons le concierge, qui derrière une longue banque semble surveiller les allées et venues des habitants. Au passage, il recueille les doléances de chacun. Lampe de la cave cassée. Plus d’eau le soir…

 

Le concierge remet à Monsieur Enzelberger un trousseau qui permet d’accéder tout en haut. Nous prenons l’ascenseur jusqu’au dernier étage. Ensuite les clefs cliquètent dans un nombre impressionant de serrures. Ceci, et les grilles, les filets de sécurité devant les fenêtres me donnent vaguement le sentiment d’un univers carcéral. Mais il ne s’agit que d’assurer la sécurité des locataires.

 

Arrivés sur le toit, Alexandre mitraille le paysage alentour. Il est sujet au vertige et le voir ainsi s’approcher de la rambarde, mais pas trop, essayant de maîtriser sa peur du vide est très drôle. Je tente de distraire Monsieur Enzelberger pour qu’il ne trouve pas le temps trop long pendant ces prises de vues. J’apprends qu’il est responsable de tout le secteur, et que le secteur est vaste. Comme il me le montre en tendant la main vers l’horizon. Mais non, Monsieur Enzelberger n’habite pas par ici, pas dans le secteur. Il a une maison individuelle plus loin au sud.

Alexandre aimerait prendre des images depuis d’autres toits, d’autres immeuble moins élevés d’où il pourrait attraper les façades de face et non d’en haut, comme ici ou d’en bas, comme toujours. C’est impossible, car cet immeuble-ci est le seul qui soit doté de rambardes et pour notre sécurité… Quant à aller prendre des photos depuis des appartements inhabités, je sens que l’idée lui déplaît. Voici pourquoi nous ne voyons toujours que les mêmes photos prises d’un unique point de vue de Marzahn.

 

 

 

 

 

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19 août 2011

 

Yvan Cuche, directeur du Centre de Culture de l’ABC à la Chaux de Fonds nous a proposé de faire une résidence de travail du 13 au 20 août. Nous présenterons le fruit de ces premiers tatonnements au public le 20 août.

Alexandre et moi travaillons seuls pendant deux jours. Nous préparons une ébauche de mise en scène, des propositions à faire à nos partenaires, qui nous rejoignent bientôt. Stéphane Vögel diffusera le son. Marc Gaillard créera la lumière et Pierre Félix Gravière livrera le texte. Au départ, il s’agit de montrer au public le fruit d’une étape de travail. Mais très vite nous avons envie d’aller plus loin et de présenter une forme aboutie, si brève soit-elle et nous nous mettons en tête d’organiser au mieux les pièces d’un puzzle dont le dessin global nous échappe encore.

 

 

 

 


Images prises pendant notre résidence au centre de culture ABC à la Chaux de Fonds

 

Pierre Félix pendant les répétitions.



 

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En résidence qu Théâtre de l’ABC à La Chaux-de-Fonds. Pierre-Félix prend connaissance du texte.

 

 

 

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12 août 2011


Un plan de Marzahn, en négatif.

Une idée pour la scénographie

 

 

 

 

 

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25 juillet 2011

 

En visitant les sites Myspace des différents groupes qui répètent à Orwohaus, Alexandre avait remarqué Nobelschrott, un groupe de filles punk dont on pouvait voir certains moceaux filmés lors d’un concert à Eastend pour la Fête de la musique. En fait, Eastend est un centre de loisirs pour les enfants et les adolescents. La plupart des activités proposées ont un lien avec la musique. Les jeunes du quartier peuvent venir répéter avec leur groupe, utiliser le studio d’enregistrement, ou seulement boire un verre, manger, traîner… Micha travaille ici comme animateur. Il dégage une énergie peu commune. Il guide les jeunes musiciens de Hellersdorf vers une carrière professionnelle. Selon lui, le problème des gens ici, c’est qu’ils ont trop l’habitude d’être assistés. Ils ont perdu le sens de l’initiative et de la responsabilité. C’est notamment pourquoi les activités sont payantes, même si les tarifs sont extrêmement abordables. Il ne cache pas que nous sommes dans un quartier difficile. Il nous semble toucher enfin un peu de vérité alors que nos précédents interlocuteurs nous semblaient avoir un discours trop positif qui cadrait peu avec les réactions méfiantes, voire agressives que nous avons rencontrées dans le quartier. Il me donne l’autorisation de venir discuter avec des jeunes dans le café d’Eastend. Je pourrai le faire dès le mois de septembre, lorsque je reviendrai pour une deuxième session de travail.

 

 

 

 

 

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23 juillet 2011

 

 S-Bahn jusqu’au terminus, tout au nord du quartier.  Ici les immeubles n’ont pas été rénovés. Il y a un petit centre commercial. Mais la plupart des boutiques sont vides, ornées de panneaux «  à louer ». Seul le supermarché Netto semble prospérer. On y trouve à bas prix des copies de produits de marque. Les familles profitent  du beau temps autour de la place de jeux. Les enfants font du trampolin, grattent le sable, dévalent le toboggan. Peu de mots.
Le soir tombe, nous retournons vers Mehrowerallee pour boire un verre dans une petite buvette. A la table voisine, un gars parle en français dans son téléphone portable. Il souhaite développer ses affaires à Marzahn. Je ne peux m’empêcher de penser qu’il n’agira pas en bienfaiteur de l’humanité… Cela me rappelle un graffiti lu sur un mur il y a longtemps : Il faut prendre l’argent des pauvres, ils n’en ont pas beaucoup, mais ils sont nombreux !
Un peu plus loin des types boivent bières sur bières. Des disputes, éclatent puis on se réconcilie. Deux gars restent à l’écart, Ils parlent longuement de leurs chaussures, qui sont identiques. L’un d'eux est allé dans différents quartiers de Berlin pour comparer les prix. Finalement ses chaussures lui ont coûté 100 euro.  Il énumère les différentes couleurs, puis les divers modèles de la marque. Il me semble que ce dialogue contient toute la fragilité, la tendresse et la pauvreté que je souhaite écrire. Je voudrais capturer la musique de ces mots sans espoir. Laisser traîner une oreille indiscrète. Attraper au vol ce qui ne m’était pas adressé, c’est une méthode un peu malhonnête, mais c’est un moyen d’entendre la parole des gens d’ici, d’écouter ce qu’ils disent et non ce que j’aimerais qu’ils me racontent.

 

 

 

 

 

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22 juillet 2011

 

 

Rendez-vous à 11h00 avec Madame Stegemann, l’attachée de presse de la mairie de Marzahn Hellersdorf. Nous nous perdons dans les couloirs, et aucun employé ne peut nous indiquer où se trouve le bureau de Madame Stegemann. C’est un dédale étroit et mal éclairé, nous finissons tout de même par frapper à la bonne porte. Un petit bureau encombré, nous avons à peine assez de place pour nous asseoir. Madame Stegemann nous apprend qu’une artiste française est déjà venue, il y a plusieurs années lui demander des renseignements sur le quartier pour un projet. Elle aussi avait le désir de rencontrer des habitants. Elle n’y était qu’à moitié parvenue puisque c’est la fille de Madame Stegemann qui avait finalement accepté de s’entretenir avec l’artiste. Malheureusement, Madame Stagemann ne se souvient pas du nom de cette dernière. Elle nous donne de nombreux dépliants et nous conseille de nous adresser à des associations pour aborder les habitants. Elle nous guide jusqu’au bureau d’une de ses collègue qui elle aussi nous donne de nombreux dépliants. Nous recevons même des autocollants. Qu’allons nous pouvoir faire de tout ça ? Nous remercions et nous retrouvons bientôt sous la pluie soulagés d’échapper à l’atmosphère étouffante de la mairie.

 


 

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21 juillet 2011

 

Une fois de plus le nom de Monsieur Niemann a agi comme un sésame. Rendez-vous avec Berndt Hunger, sociologue qui a collaboré avec le conseiller municipal à la rénovation d’ensemble du quartier de Marzahn Hellersdorf. Il nous explique en quoi ont consisté les modifications dans le quartier. Certains immeubles ont vu leur nombre d’étages réduit, des ascenseurs ont été installés dans des immeubles de cinq ou six étages afin de les rendre accessibles aux personnes âgées et aux handicapés. Des cafés et d’autres commerces ont ouvert leurs portes au pied des tours. Les toits ont été tranformés en terrasse… Son travail a notamment consisté à mettre en évidence les différents quartiers de la nouvelle ville et à souligner leurs personnalités respectives afin d’échapper à l’uniformité des grands ensembles. Ainsi les plantations ont-elles différé selon les quartiers : des arbres fruitiers dans une zone plus villageoise, des châtaigners dans Kastanienallee… Les couleurs des immeubles et leur habillage ont également été déterminés en fonction de leur caractère.  Selon lui, cette architecture ne génère pas de problème particulier si on l’adapte aux besoins des habitants. En revanche les problèmes des habitants s’expriment dans leur quartier, et des problèmes, il y en a nécessairement quand 40% de la population adulte est au chômage. Il me parle du confort de vie à Marzahn, de nombreuses crèches, de centres médicaux, de clubs de sport, de la beauté de la nature alentour… J’évoque le fait que si nombre d’activités sont proposées aux habitants, il n’y a pas de lieux culturels, tels des salles de concerts ou des théâtres. Que ce serait peut-être bien… Pour cela, il suffit de prendre le S-Bahn, jusqu'au centre de Berlin. Apparemment la culture ne fait pas partie des besoins des habitants.

 

 

 

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20 juillet 2011

 

Nous passons une bonne partie de la journée plongés dans les archives photographiques du Bezirkmuseum de Marzahn. Il s’agit le plus souvent d’images prises par le photographe Dieter Breitenborn. Elles documentent la construction du quartier année après année. Sur certaines, les immeubles constituent le seul horizon.  Il y a aussi des images de la fête des sports de 1980, et du printemps de Marzahn. Nous en sélectionnons environ 150 que nous scannons.

J’ai ensuite rendez-vous dans une maison de retraite afin de demander l’autorisation d’interroger les résidents. L’ergothérapeute se laisse convaincre que ce peut être intéressant pour les vieilles personnes de reparler de leur passé, surtout de choses simples et quotidiennes comme celles qui m’intéressent, mais elle part en stage, puis en vacances… Rien ne sera possible avant le mois d’octobre.
 
Personne n’a répondu aux annonces que j’ai déposées dans les entrées des immeubles et les grands magasins. Pas davantage à celles que nous avons mises dans la presse locale et sur Internet. Nos contacts quotidiens avec les habitants sont quasi inexistants, quand ils ne s’engagent pas sur un mode agressif. De fait, nous sommes confrontés à un problème que nous n’avions pas envisagé en arrivant ici il y a un mois : nous avons beau nous repérer de mieux en mieux dans le dédale des immeubles, des allées et contre allées, Marzahn nous échappe. Marzahn  nous demeure inconnu. Nous n’avons pas la moindre idée de ce que pensent les gens du quartier. Les seuls qui nous ont parlé sont ceux qui d’une manière ou d’une autre ont une position de pouvoir. La plupart n’habitent pas à Marzahn. A ce jour, mon texte ne peut être traversé par la voix des habitants, mais au  mieux, par celle des gens qui ont pensé et pensent encore la ville pour eux. Or ce discours est nécessairement partial, orienté, soumis à des enjeux qui nous échappent.

 

 

 

 

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19 juillet 2011

 

Entretien avec Wolf-Rüdiger Eisentraut 

 

Rendez-vous avec Monsieur Eisentraut, architecte qui a participé à la conception du quartier de Marzahn. Prévoyant que nous aurons des difficultés à trouver son bureau, nous arrivons dès 16h40 alors que le rendez-vous est à 17h00. Je remarque dans la rue un homme de haute taille vêtu d’un costume blanc. Il semble nous observer un instant puis se détourne et nous évite. Il reproduit cette manœuvre plusieurs fois pendant que nous faisons les cent pas devant l’immeuble. Ponctuels, nous sonnons à 17h00. L’homme en blanc nous ouvre la porte, c’est Monsieur Eisentraut. Personne ne mentionne que nous nous sommes croisés en bas de l’immeuble. Je lui demande si je peux enregistrer notre entretien : non. L’architecte a l’air de vouloir imposer un rapport de forces dont l’enjeu m’échappe. Il est d’abord très curieux de comprendre ce qui nous a conduit jusqu’à lui. Je lui décris notre projet de spectacle. Vous croyez vraiment que les gens vont s’intéresser à Marzahn en Suisse ? Pourquoi pas, vous ne trouvez pas cela intéressant ? Alexandre, plus provocateur répond que les gens s’intéressent à notre travail quel que soit ce dont on parle. Cette dernière réponse fait sourire notre hôte. Il répond ensuite volontiers aux questions que je lui pose et sort de ses archives différents plans et documents significatifs. Il explique que l’ensemble du quartier de Marzahn a été réalisé par l’architecte Heinz Graffunder, les immeubles ont ensuite été dessinés par ses collaborateurs, dont Monsieur Eisentraut faisait partie. Il a en particulier été chargé de concevoir la mairie, la gare de Marzahnertor (aujourd’hui rebaptisée Marzahn), le centre du quartier et la maison de la culture. A l’époque, le quartier ne s’appelait pas encore Marzahn. On parlait du neue Stadtbezirk (nouveau quartier). Comme je ne peux enregistrer l’entretien, je prends des notes. 

 

 

 

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 Le premier mot que je relève est jeu. Le jeu donc consistait à contruire le plus de logements possible en aussi peu de temps que possible. C’est cela qui a déterminé le choix de construire les immeubles en utilisant des dalles préfabriquées. On pouvait produire en série les éléments constitutifs des bâtiments en usines, puis les livrer sur le chantier et effectuer le montage. Cette dernière opération était très rapide : 5 minutes par dalle. Les éléments mesuraient 6 mètres de long. Pas davantage car les grues ne pouvaient soulever plus de 6,5 tonnes, mais pas moins car on utilisait le moins d’éléments possible par appartement, afin de minimiser le temps de montage. Je demande si les proportions des appartements avaient un rapport avec le modulor du Corbusier. Réponse : Le Corbusier était fou. Moi aussi je suis fou… mais d’une autre manière. Evidemment c’était une influence, mais pas la seule. En fait, il ne s’agissait pas seulement de logements, mais de vie. On pensait au confort des habitants, on prévoyait tout ce dont ils pourraient avoir besoin pour être bien là où ils vivaient. Cela fonctionnait parce qu’il y avait de nombreux lieux de rencontre. J’ai construit 6 bibliothèques dans le quartier. Il n’en reste que 2 aujourdhui. Et il y avait des commerces tout le long de la Promenade. Tous ont fermé après la Wende. Le centre de Marzahn a été détruit. A la place se dresse East Gate, l'immense centre commercial. Il ne s’agit plus de répondre aux besoins des gens, mais de faire un maximum d’argent, jusqu’à ce que le filon s’épuise et qu’on démolisse ce centre commercial aussi. Monsieur Eisentraut évoque ensuite la mixité sociale du quartier. Un professeur pouvait voisiner avec un ouvrier et boire une bière ensemble le vendredi soir... Les logements étaient bon marché, on choisissait un appartement en fonction de ses besoins. A ce point je demande si l’on peut parler d’une architecture socialiste. Je ne sais pas, répond-il. Et que pensez-vous des rénovations effectuées dans le quartier. J’évoque en particulier le nouvel aspect coloré des immeubles. Sa réponse est lapidaire. C’est de la merde. Les bâtiments vivaient, la couleur des matériaux évoluaient avec le temps. Il ne reste rien de ce choix esthétique.

 

 

 

 

 

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18 juillet 2011

 

Alexandre a remarqué que de nombreux habitants de Marzahn sont tatoués. Il s’intéresse surtout au travail de Pavian, un tatoueur qui officie à Hellersdorf. Après avoir essayé de le joindre plusieurs fois par téléphone en vain, nous décidons d’aller sur place, d’autant que nous connaissons mal cette partie du quartier.

 

Une heure de métro plus tard, nous franchissons le pont qui relie Marzahn à Hellersdorf et ses immeubles rose saumon. Nous connaissons l’adresse du tatoueur, mais la numérotation de la rue est si impénétrable que nous ne trouvons pas sa boutique. La place qui s’étend devant nous semble être le centre du quartier, la boutique du tatoueur s’y trouve certainement. C’est jour de marché. Mais un seul stand se dresse sur la place. Des sacs en faux cuir, des contrefaçons de vêtements de marque. Il y a aussi un fleuriste. Alexandre photographie les immeubles quand deux types jaillissent du café du coin. Qu’est-ce que vous faites là ? C’est privé ! Il faut une autorisation pour photographier. Nous accélérons le pas. J'aperçois la boutique de Pavian, et nous nous préparons à le rencontrer. Les gars nous rejoignent, prêts à passer à l’action. Ils aimeraient bien cogner un petit peu, mais Alexandre désamorce, il fait des photos à usage privé, c’est joli Hellersdorf, bien sûr il range son appareil, voilà. Et la prochaine fois il demandera une autorisation…
Le tatoueur :  un type arborant de ces lunettes de soleil qui masquent complètement le regard est appuyé à la porte de la boutique. Il nous laisse entrer sans mot dire si bien que je le prends pour un client. La boutique est vide. Qu’est-ce que je peux faire pour vous ? demande-t-il finalement après nous avoir laisser mijoter suffisamment longtemps à son goût. Lorsque je lui explique, il nous décrit un univers improbable dans lequel ses clients viennent de loin pour se faire tatouer. Et ils sont obsédés par des questions de droits. On ne peut pas photographier un tatoo car il appartient à celui qui le porte. L’homme n’a pas d’ami qui pourrait ête un peu plus détendu sur cette question. Non non non.
La nuit je fais ce rêve : j’avance sur une place brûlante de soleil qui ressemble étrangement à celle d’Hellersdorf. Des chiens aboient de toutes parts, très fort, comme s’ils étaient à mes pieds, prêts à me sauter à la gorge, mais je ne les vois pas je suis seule sur la place. J’avance, terrifiée sous le soleil.
 
 
 

 

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15 juillet 2011


Visite de tous les myspace des groupe de ORWOhaus.

Notre préféré est un groupe de punk qui s'appelle Nobelschrott. La chanteuse chante en allemand. L’atmosphère qui s’en dégage nous paraît proche de celle de Marzahn aujourd’hui.


Nous visionnons le premier épisode de Einzug ins Paradies une série télévisée produite par la télévision de la RDA et réalisée par Achim et Wolfgang Hübner : cinq familles emménagent dans le quartier encore en construction de Marzahn et s’adaptent au nouvel environnement qui est le leur.

 

 

 

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Prise de vue à la tombée du jour au alentours de Mehrower Allee.

 

 

 

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14 juillet 2011


Prise de vue aux alentours de la station de S-Bahn Poelchaustrasse.

Une sortie du métro m'amène à la rue Frank Zappa et à la Orwohaus.

Il s'agit d'un ancien bâtiment de la société Orwo qui produisait des cassettes et des bandes magnétiques avant la chute du mur.

Il abrite aujourd'hui les locaux de répétitions de plus de 200 groupes.

 

 

 

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De l'autre côté de la station de S-Bahn, prise de vue du point de vue de l'herbe.

 

 

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13 juillet 2011


Entretien avec Monsieur Niemann dans un bureau de la mairie de Marzahn.

 

 

 

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Hier soir un message de Monsieur Niemann nous attendait sur le répondeur.

 

Rendez-vous ce matin à 10:00 devant la mairie de Marzahn. Monsieur Niemann a travaillé dans ces murs une dizaine d’années et notre entretien se déroule dans le bureau qui fut le sien. Ses anciens collègues, sa secrétaire, nous accueillent très aimablement. Il est ému de se retrouver ici. Il nous offre aussitôt un livre et diverses brochures concernant le quartier.

 

Herr Doktor Heinrich Niemann a étudié la mécanique avant de s’orienter vers la médecine sociale, ce qui l’a amené à la politique. Il fait partie de die Linke. Ainsi est-il devenu Bezirkstadtrat, puis Bezirksverordneter. On peut traduire cela par conseiller municipal, délégué, mais les responsabilités que recouvrent ces fonctions sont un peu différentes de celles d’un conseiller municipal en Suisse ou en France. Durant ses différents mandats, il a travaillé au service de la santé et au développement écologique de la ville.

 

Il évoque les clichés liés à Marzahn, à la D.D.R. Il raconte qu’une journaliste de la radio l’interviewant devant la mairie a introduit l’entretien en disant : nous nous trouvons devant un bâtiment gris… Or la mairie est recouverte de carreaux de faïence jaune et marron !

 

Nous espérons comprendre mieux le projet de société qui a présidé à la construction de la cité. Les réponses de Monsieur Niemann nous amènent à comprendre que Marzahn a été pensé non comme un quartier mais comme une véritable ville, indépendante de Berlin où les habitants trouveraient tout ce dont ils avaient besoin. Tous les milieux sociaux devaient être représentés ici, ce qui correspondait à la réalité du manque de logements dans la capitale, et avait aussi pour but de reconstituer le tissu social d’une ville. Chaque famille recevait un appartement adapté, en fonction de ses besoins. L'idéal auquel souhaitait parvenir le gouvernement en termes de logement était une pièce par habitant.  Dans cette ville nouvelle, on a d’emblée réservé une large place aux espaces verts. Ainsi le Kienberg, l’Erholungspark et le long sentier de promenade qui longe la Wuhl. Même les cours d’immeubles sont noyées dans la verdure. Tilleuls, chênes, peupliers, Monsieur Niemann énumère les arbres plantés ici. La plupart poussent à l’état sauvage dans la région. Des volontaires allaient planter des arbres, des fleurs en-dehors de leurs heures de travail. Les habitants s’occupaient des jardins dans les cours de leur immeuble. Il explique qu’il a lui-même planté des arbres sur le Kienberg. Il reste profondément attaché à cette colline sur laquelle on a entassé les débris des immeubles détruits d'Alexanderplatz.

 

 

 

 

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Je pose plusieurs questions sur le cimetière, dans lequel je me suis promenée à diverses reprises. Selon lui c'est un sujet intéressant. Il me montre sur la carte fixée au mur l'emplacement du camp de concentration pour les Tziganes et les Roms dont j'ai tant cherché la trace. Des soldats allemands et russes reposent dans ce cimetière, des résistants au nazisme, des victimes de bombardements. Tous sont là, explique Monsieur Niemann. Et il me raconte cette histoire concernant les ouvrières polonaises qui travaillaient pour l’usine AEG de Wedding. Dans la nuit du 3 au 4 septembre 1943, vingt jeunes femmes perdirent la vie lors d’une attaque aérienne. Elles effectuaient des travaux forcés et n’avaient pas le droit d’accéder aux abris où se réfugiaient les ouvrières allemandes pendant les bombardements. Elles devaient rester à leur poste de travail. On les enterra au cimetière de Marzahn. Le mari de l’une d’elles, un jeune homme alors, qui a survécu à la guerre se promit d’offrir une sépulture à son épouse et à ses collègues. Il lui aura fallu plus de soixante ans pour rassembler les fonds nécessaires. Depuis 2004, des monuments commémoratifs se dressent à l’emplacement de l’usine et au cimetière. Puis il s’est éteint lui aussi.

 

Avant de nous séparer, je demande encore pourquoi tant de gris en R.D.A ? C’était gris ? demande Monsieur Niemann. Il me regarde longuement il sourit. C’est une question pratique, économique : la peinture prend du temps, et elle n’est pas nécessaire. On avait besoin des logements au plus vite. Et cela permet de laisser voir la matérialité du bâtiment. On n’avait pas besoin d’être séduit par les couleurs, on n’attachait que peu d’importance à l’apparence des immeubles. Ce qui comptait c’était l’intérieur, le chauffage, l’eau chaude au robinet, les toilettes, les ascenseurs… Pour les gens, c’était la même chose. Ce qui comptait c’étaient les qualifications, on n’avait pas besoin de se vendre. Certains ont réussi à s’adapter à la société capitaliste après la chute du mur. D’autres non.


 

 

 


12 juillet 2011


Une annonce dans le supermarché Kaiser's de Helen Weigel Platz.

 

 

 

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11 juillet


Mon texte manque encore de chair, et jusqu'à présent nos tentatives pour entrer en contact avec des personnes ayant participé à la conception et à la construction de la cité de Marzahn se sont avérées infructueuses. Nous avons donc décidé d'essayer de nous adresser aux habitants de la cité.

 

Je suis allée coller des affiches à l'entrée des immeubles de la Marchwitzastrasse, les premiers qui ont été construits. Il y a une plaque sur une façade d'immeuble qui indique que la première pierre de cette nouvelle cité a été posée le 8 juillet 1977. Les premiers locataires de la cité ont emménagé le 18 décembre de la même année. Une sculpture commémore ce nouveau commencement. La silhouette d'un homme rappelant le modulor du Corbusier se découpe dans une plaque de béton. Il lève le bras comme pour appeler les passants à se joindre à lui. Au-dessus, la couronne semble un noeud de béton. Une vieille dame me regarde d'un air interrogateur en me voyant coller mon petit papier juste au-dessus de l'interphone dans l'entrée de son immeuble, je lui explique ce que je fais là. Elle répond seulement "ach, so was..." en souriant gentiment. Et elle entre dans l'immeuble.

 

 

 

 



 

8 juillet 2011

 

Difficile de s'approcher des habitants.

Il nous faudra les contacter par petites annonces.

 

 


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7 juillet 2011

 

Prise de vue depuis la S-Bahn.

 

 

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5 juillet 2011
 

Parkfriedhof, le cimetière. Je veux trouver l'emplacement exact du camp dans lequel étaient rassemblés les Roms et les Tziganes avant leur déportation vers Auschwitz. Il y a une stelle qui indique "Unweit von hier..." Non loin d'ici se trouvait un camp. Je tourne entre les tombes, j'observe le sol à la recherche d'une trace. Mais cette histoire demeure indéchiffrable. Je trouve presque par hasard sur les tombes de soldats allemands. A quelques mètres seulement des Russes qu'ils ont combattus.

 

Sortie du cimetière, je décide de rejoindre Raoul Wallenbergstrasse à pied. A droite, à droite encore, je pense rejoindre la voie ferrée. C'est un petit chemin bétonné pris entre deux barrières, derrière lesquelles poussent des herbes hautes. Après une longue marche au soleil, je trouve enfin une route goudronnée, un arrêt de bus.

 

J'aperçois des immeubles au loin. L'enseigne d'un Mac Donalds. Je n'ai pas la moindre idée de l'endroit où je me trouve.

 

 

 

 


4 juillet 2011
 
Prises de vues autour du Kienberg, le centre de Marzahn
 
 
 
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30 juin 2011

S Bahn jusqu’à Springfuhl. Nous marchons le long de l’allée des Cosmonautes.
Nous nous perdons dans les cours d'immeubles. Pas d’enfants aujourd’hui, il pleut sur les places de jeux.
Les gouttes d’eau s’étalent sur les bancs. Les arbres, le sable sont détrempés.
Nous montons dans un Strassenbahn.
 
 
 
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Allee der Kosmonauten
 
 
Nous descendons à Alt Marzahn, direction le Bezirkmuseum. Il y a des maquettes des différents quartiers, les anciens villages qui composent aujourd’hui Marzahn : Hellersdorf, Mahlsdorf, Kaulsdorf, Biesdorf et Marzahn. Le paysage s’étend sous nos yeux, les immeubles, les maisons sont collés, pas toujours adroitement sur de grands panneaux de bois. De vastes surfaces recouvertes de peinture verte figurent les espaces de végétation. Le Kienberg, 102 mètres d’altitude, n’était qu’une modeste colline. Il n’a acquis sa taille respectable que parce qu’il a été grossi par les tonnes de terre déblayées lors du creusement des fondations des immeubles. Il y avait de quoi faire, Marzahn est la plus grande cité d’Allemagne. Les premières barres ont été terminées en 1977, l’ensemble de la cité nouvelle a été construit en 13 ans pour répondre au manque d’appartements au centre de Berlin. Les logements y faisaient à tel point défaut qu’on n’avait pas l’autorisation de venir s’installer dans la capitale est-allemande lorsqu’on habitait la province. Et les Berlinois ne disposaient que rarement de toilettes intérieures, de salle de bains, pas d’eau chaude au robinet. On se chauffait au charbon. Les appartements des Plattenbauten de Marzahn étaient d'un tout autre standing avec le chauffage central et une salle de bains dotée d’une baignoire. La gardienne du musée nous explique leur mode de construction, de grandes plaques de béton superposées. Fixées les unes aux autres par du ciment. Le plus suprenant ce sont les salles de bains. Des modules complets, intégrant toilettes et baignoire arrivaient par camions, puis étaient encastrés dans leur emplacement. Les ouvriers devaient travailler avec une extrême précision pour que l’assemblage puisse être réalisé sans difficulté.
 
 
 
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La conversation dérive, nous apprenons que la dame a vécu 18 ans à Marzahn, elle montre sur la maquette, l’immeuble dans lequel elle a habité. Juste au sud du Kienberg justement. Il faut imaginer que les arbres n’étaient pas encore plantés. Que tout était gris. Je demande pourquoi gris, pourquoi tout ce gris en R.D.A. ? Pas le temps de peindre ! On avait imaginé une méthode de construction très rapide, la plus rapide possible, ce n’était pas pour passer des mois à peindre par la suite. Et puis les gens peignaient leur balcon comme ils le souhaitaient, ils personnalisaient leur appartement chacun à leur manière…

 

 

 

 


20 juin - 29 juin

 

J'apprends que l'entreprise qui a construit les immeubles de Marzahn s'appelait Ingenieur Hochbau. Leur site internet indique un numéro de téléphone, je le compose aussitôt : il n'est plus attribué. Je cherche encore, un certain Joachim Lindner semble avoir conçu les fondations des immeubles, apparemment il enseigne à la Techniche Universität, je téléphone, mais il est à la retraite depuis longtemps. Aimable, mon interlocuteur me dit que le professeur Lindner habite à Grünewald. Par chance il est dans l'annuaire. Mais le répondeur s'enclenche aussitôt. Il en est de même le lendemain et les jours suivants. Je laisse des messages qui demeurent sans réponse... A la mairie, on me dit qu'un certain Professeur Niemann s'est occupé d'aménager les espaces verts dans la cité, il joue aussi un rôle politique important puisqu'il fait partie de Die Linke*. Et c'est un habitant de la première époque. J'échange plusieurs mails avec le monsieur pour convenir d'un rendez-vous,  à partir du moment où je lui explique plus précisément notre projet... Rien. *


*Die Linke la page wikipédia

 

 

 

 



Avril 2011
 
 Découvrant Marzahn, nous avons l’un et l’autre été impressionnés par son aspect monumental, étrangement disproportionné quand on sait qu’il s’agit là d’un quartier d’habitation. Nous y avons d’abord vu le reflet de l’idéologie socialiste appliquée à l’architecture, avec tous les clichés qui sont associés à ce type de gouvernement tant l’individu paraît infiniment petit, sans importance dans cet univers où le collectif semble la règle. De là est né le besoin d’interroger cette architecture, d’en comprendre les intentions, le projet qui la fonde, mais aussi la manière dont elle est habitée par ceux qui vivent là. Puis nous avons commencé à nous questionner sur l’histoire de ce lieu. Elle ne commence évidemment pas dans les années 1970 avec la construction des immeubles. Mais pourquoi ne demeure-t-il de l’ancien village qu’une rue ? Nous avons découvert un passé marqué au rouge par le nazisme et la Seconde Guerre Mondiale, une histoire réécrite, instrumentalisée par la dictature socialiste... De là, de nouvelles questions sont nées. Quelle conscience les habitants de Marzahn ont-ils de cette histoire ? Comment vivent-ils sur les lieux mêmes de la dévastation ?
 
 
 
 
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